Celle de toujours, toute – Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard

Si je vous dis : j’ai tout abandonné

C’est qu’elle n’est pas celle de mon corps,

Je ne m’en suis jamais vanté,

Ce n’est pas vrai

Et la brume de fond où je me meus

Ne sait jamais si j’ai passé.

L’éventail de sa bouche, le reflet de ses yeux,

Je suis le seul à en parler,

je suis le seul qui soit concerné

Par ce miroir si nul où l’air circule à travers moi

Et l’air a un visage aimant, ton visage,

A toi qui n’as pas de nom et que les autres ignorent,

La mer te dit : sur moi, le ciel te dit : sur moi,

Les astres te devinent, les nuages t’imaginent

Et le sang de la générosité

Te porte avec délices.

Je chante la grande joie de te chanter,

La grande joie de t’avoir ou de ne pas t’avoir,

La candeur de t’attendre, l’innocence de te connaitre,

O toi qui supprimes l’oubli, l’espoir et l’ignorance,

Qui supprimes l’absence et qui me mets au monde,

Je chante pour chanter, je t’aime pour chanter

Le mystère où l’amour me crée et se délivre.

Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même.

Celle de toujours, toute
Poèmes de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard

Citations de Eugène Emile Paul Grindel, dit Paul Eluard